loui.jean.cormier.le.treizieme.etageLouis-Jean Cormier
Le treizième étage

Simone Records
Québec, Canada
Note : 9/10

 

Quand Louis-Jean Cormier a mis les pieds sur la scène du Club Soda lors du lancement du treizième étage, il était dépourvu de ses acolytes karkwaïens pour une première fois et pour une première fois, c’était une partie de lui-même qu’il dévoilait au public. « Je vais prendre la liberté de dire que c’est un album de Louis-Jean Cormier, si vous permettez, parce que c’est vraiment l’album que je voulais faire depuis longtemps, » a dit l’auteur-compositeur-interprète avant de s’exécuter pour quelques morceaux. Une chose est certaine, nous étions aussi contents que lui de pouvoir assister à l’éclosion d’un talent personnel, un talent brut. Nous savions depuis plus de 10 ans que Cormier avait du talent; les multiples succès de son groupe Karkwa en témoignent, mais ce qui interpelle l’oreille devant un Cormier en solo, ce sont les mots. Il y avait bien sûr des textes dans les pièces de Karkwa, mais l’accent étant mis sur la musique planante, toujours en avant plan, cela n’a jamais permis aux textes de Karkwa de se trouver au centre de leur musique. C’était bien comme ça et c’était voulu.

Ce que l’on remarque aujourd’hui est une finesse d’écriture digne des plus grands, développée dans une musique parfois lyrique, parfois plus rythmée, et ce, dans une cohésion maîtrisée. Avec le soutien de Daniel Beaumont, qui a collaboré aux paroles et à la direction artistique de l’album, on retrouve un Louis-Jean Cormier à des milles de ce que Karkwa était : des textes plus concrets, une voix plus dominante et une sensibilité qui surpasse beaucoup de chansons québécoises nées dans l’année.

Même s’il s’agit d’un projet solo, Louis-Jean Cormier a su bien s’entourer. Marie-Pierre Arthur ainsi que la fille de Michel Rivard, Adèle Trottier-Rivard ajoutent une touche féminine avec leur présence vocale. Notons au passage que la jeune Adèle effectue sur scène un travail rythmique exemplaire et surtout impressionnant sur des percussions.

Le chanteur-poète revisite la chanson engagée avec Un refrain trop long qui parle de la situation du Québec parti à la dérive au printemps dernier. « Ces mots me sont venus en tête juste avant qu’on sorte dans la rue avec nos casseroles, » a-t-il lancé avant de pousser les premières notes de la pièce en compagnie de son ami Martin Léon. Ce n’est pas une chanson revendicatrice à la première écoute. Les métaphores nécessitent un travail d’écoute plus grand avant de comprendre la signification plus grandiose et si juste de la situation décrite par Cormier.

Les morceaux solos du chanteur de Karkwa deviennent une véritable poésie à écouter plusieurs fois afin de saisir tous les sens connexes des mots. Le cœur en téflon est l’une des belles prouesses métaphoriques de l’auteur : « j’ai beau crier à tue-tête que c’est ici que j’arrête, pas le moindre écho d’un ami proche, le cœur en téflon, plus rien dans les poches, une main sur le front et l’autre qui s’accroche au bout d’un crayon. » Passant par des sonorités folk ou parfois plus rock, Louis-Jean Cormier nous offre des textes où chaque mot choisi est plus joli que celui que nous avions anticipé.

Les balades sont charmantes dès les premières notes, comme Les chansons folles : « T’es le vrai présent, la tête en suspend, les pieds sur terre, sans aucun déclic, dans l’horloge fixe qui s’empoussière. » ou L’ascenseur : « Ça prend autant de folie que de courage pour descendre ensemble au treizième étage et fermer la porte aux mauvais présages, avec ta main comme seul bagage. »

Les mots que nous entendons dans ce début de carrière solo nous charment et apaisent les angoisses automnales les plus sévères. Le treizième étage est le remède aux tourments provoqués par la morosité de la saison. La grande rentrée montréalaise de Louis-Jean Cormier aura lieu le 21 novembre au Club Soda.

Une réponse

  1. Bonsoir, je pense vraiment avoir apprécié cet album. Enfin je ne suis pas très sûr. Louis-Jean Cormier? En effet. Est-ce qu’on peut vraiment être sûr de la volonté de ce chanteur à lunette, aussi barbu soit-il? Peut-être. La chose qui est certaine, c’est qu’un dragon à deux têtes écoutant son album aurait certainement un peu de misère à écouter cet album, trop peu de sortie pour quatre oreilles, comme on dit… Bref, une symbiose vocale et nuptiale à ne pas sous-estimer, pour quiconque souhaite s’inspirer de nuit à la havane 2.

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