Nettwerk Records
Australie
Note : 6,5/10
Spleen. Dans Les Fleurs du Mal, il y a un peu moins de deux siècles, Baudelaire qualifiait le spleen ainsi :
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits;
Dans la voix, les mots, l’allure et le ton de Julia Stone, on ne sent que ça : le spleen. Cette espèce de découragement poétique sans issue. Dans la musique vaporeuse que l’on entend sur By the Horns, produit par Thomas Bartlett (The National) et Patrick Dillett (Mary J Blige), c’est à la fois touchant et lourd. Entre les deux, notre coeur balance.
Bien entendu, la solitude est centrale dans ce deuxième album solo de la moitié féminine du groupe Angus & Julia Stone. Des contributions extérieures nombreuses pimentent toutefois la voix langoureuse de l’Australienne. Sur Let’s Forget All the Things That We Say, qui ouvre l’album, elle chante aux côtés de Benjamin Biolay, une voix masculine à l’aide de laquelle elle rappelle inévitablement le duo qu’elle forme avec son frère.
Lorsque Julia se la joue solo, on se lance dans une musique encore plus planante que celle du tandem. On entend un indie folk déprimé, mais touchant, dépouillé, mais poétique. Les mots de la chanteuse sont teintés de féminité, chose que l’absence de son frère lui permet de faire. Les tromperies, les amants, les hommes qui s’en vont. Oui: le spleen.
Julia Stone reprend aussi Bloodbuzz Ohio de The National (Brett Devendorf de The National prête même sa batterie aux sonorités de Stone à deux reprises) avec une sensibilité de fille prête à craquer. C’est joli.
La pièce titre By The Horns est touchante du point de vue des paroles, encore une fois déchirantes, relatant la trahison d’un homme : My music was still in the air. My hair still on the pillow. Le premier simple It’s All Ok propose pour sa part une mélodie de piano accrocheuse. I Want To Live Here évoque une lassitude poussée à l’extrême qui pourrait ultimement rendre l’auditeur las également. With The Light est encore plus lourde encore, rappelant par ses sonorités la pièce Let Go de Frou Frou, mais sans le rythme. On sent une profonde tentative d’aller rejoindre les rangs de Feist et de son tout récent Metals, mais, malgré des sons similaires, on ne se rend qu’à mi-chemin.
Le problème majeur de By The Horns réside certainement dans le fait que l’on sent l’absence : d’abord celle qui règne dans les thématiques de manque et de solitude et ensuite l’absence d’une partie essentielle à l’excellence de Julia : Angus. Les harmonies de son frère nous manquent à chaque écoute malgré la recherche textuelle et vocale élaborée par Julia Stone.
On a entre les mains un album qui ne sonne pas faux, mais autour duquel on aurait pu construire tellement davantage. Malgré tout, l’auditeur peut savourer une voix profonde et douce et une musicalité épurée, intimiste et noire.
Dans ce spleen de début d’été, on attendra le retour du frère sur un nouvel album d’Angus & Julia Stone promis pour plus tard cette année.
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