Santigold
Master of My Make-Believe
Atlantic
États-Unis
Note : 7,5/10
En musique, le mariage entre la pop et l’alternatif n’est pas toujours gage de succès. Cette relation peut même parfois virer à la catastrophe. Surtout quand le premier des deux genres prend une plus grande part de la couverte. On a qu’à penser à l’artiste de hip-hop américain, Nicki Minaj, qui sur son dernier disque s’est davantage exercée à insulter la commercialisation de la musique qu’à produire du contenu de qualité. Ce raté amène pourtant une question intéressante. La pop serait-elle devenue une blague de mauvais goût?
Cette interrogation a fait écho dans le processus d’enregistrement du second disque de l’artiste américaine Santigold. Loin d’être une célébrité ou une habituée des palmarès, la chanteuse utilise et recycle la pop comme bon lui semble sans trop penser au nombre de fois que ses pièces pourraient être diffusées à la radio. En fait, la jeune femme originaire de Philadelphie profite du flou artistique de la pop nord-américaine pour concevoir des morceaux qui doivent en premier lieu lui plaire. Elle ne crache pas sur ce qui est susceptible de devenir populaire et ne s’empêche pas non plus de chanter sur des délires cacophoniques. Pour elle, les genres n’existent pas. La musique qu’elle conçoit n’a qu’une étiquette : son nom – Santigold.
Le disque Master of My Make-Believe est à l’image de l’artiste – à prendre ou à laisser. Pour l’apprécier, il faut d’abord aimer l’artiste et ses multiples facettes. On pourrait d’ailleurs comparer l’appréciation de ce disque à une partie de surf en mer. Avec onze morceaux navigants sur autant de courants musicaux, il est facile de s’échouer dans une zone d’inconfort comme d’en ressortir avec des sursauts d’adrénaline. Si la vague vous intéresse, accrochez-vous puisque ce disque risque de provoquer quelques revirements.
La première secousse est la plus ardue. La pièce GO! produite par Nick Zinner, le visionnaire des Yeah Yeah Yeahs, met en vedette la chanteuse, Karen O, du même groupe. Sur un rythme frénétique, Santigold donne le ton au disque. Pourtant, les répétitions viennent affliger le morceau d’une certaine lassitude. Disparate Youth vient régler la situation. Cette production de Ricky Blaze détone par son originalité et son message interpellant. «So let them say we won’t do better, lay out the rules that we can’t break / They want to sit and watch you wiggler, their lecacy’s too hard to take», chante une Santigold rêvant d’émancipation et de courage.
Les pièces suivantes ne sont pas sans rappeler les succès de la chanteuse sri-lankaise, M.I.A. Les deux artistes se ressemblent d’ailleurs beaucoup. Toutes deux ont une attirance pour la musique dansante à saveur internationale. Pourtant, Santigold se différencie par la simplicité de ses morceaux. Avec moins d’artifices dans la production, l’Américaine jouit d’un espace lyrique plus intéressant. Elle en profite sur This isn’t our Parade et The Riot’s Gone pour passer son message.
Master of My Make-Believe se veut un moyen pour Santigold d’émanciper le rêve de la désillusion. Le défaitisme n’existe pas sur ce disque. Si bien que l’artiste nous martèle sans ironie que notre verre est encore à moitié plein. Il s’agit là d’une bonne dose de sincérité et d’honnêteté qui au fond nous fait apprécier de nouveau la pop alternative.