C’est dans une salle peu illuminée du Datcha, autour d’une bouteille de rosé, qu’Antoine Bordeleau et Thomas B. Martin discutent de Jazz Pranksters, Boskorgï et Mortal Kombat.
Thomas raconte leur rencontre sept ans plus tôt: «on s’est connus bien avant de partir Boskorgï, à Québec en 2012. On s’est rencontrés à travers la scène marginale et on fait partie des gens qui ont aidé à partir le Pantoum.» Le début de leur coopération musicale à Montréal, elle, est survenue grâce à une connexion bien différente selon Antoine: «on s’est vus une couple de fois parce qu’on s’est dit que ça serait cool de jouer à Warcraft 3». L’histoire s’est poursuivie avec l’achat d’instruments: un synthé Korg pour Thomas et un Boss échantillonneur pour Antoine. En combinant les noms des eux instruments, ils en sont venus à Boskorgï, cimentant ainsi leur duo musical.
Une combinaison d’ingrédients curieux
Boskorgï est un duo assez unique dans la contre-culture montréalaise. Créé par les deux amis de longue date, le style devient sur cet album une union du jazz et du hip-hop, passés dans un blender décoré par la pop d’un synthétiseur. Ce son particulier peut être expliqué par les nombreux groupes et styles qui ont influencé le style déjanté de Boskorgï. Antoine relate d’abord les influences hip-hop: «personnellement, j’ai toujours été un gros admirateur de hip-hop très minimaliste, des trucs plus purs et assez raw». Thomas renchérit: «on s’est aussi beaucoup rejoints autour de ce que fait Mndsgn (prononcé mind design) qui a vraiment précisé nos achats de vinyles». Il explique aussi comment le style de la city pop japonaise est récemment devenu une de leur source majeure d’inspiration: « c’est de la musique très cheezy, typique des années 80 où l’intention était de faire de la musique western sans connaître les codes. En improvisant, ça donne des détails malades.» Pour Antoine, le style de slap de basse présent dans la city pop japonaise les a tellement enchantés qu’ils ont voulu l’incorporer dans leurs chansons.
Travailler en s’amusant
Boskorgï n’est pas seulement défini par ses influences. Le résultat est plus qu’un collage de styles funky. Jazz Pranksters, démontre avant tout leur désir de s’amuser en expérimentant. «Ce qu’on fait, ce n’est pas vraiment du jazz, d’où le titre Jazz Pranksters, dit Antoine. C’est quand même une influence importante: il y a beaucoup d’improvisation, de solos et de one take, pour beaucoup de tracks, on s’est mis à les aimer avec leur petit côté croche». «Dans l’idée de Jazz Pranksters, il y a le fait que moi je n’ai aucune formation musicale et je viens avec le squelette de la plupart des chansons», renchérit Thomas. Selon les deux membres, les chansons de Jazz Pranksters sont généralement plus basées sur un sentiment ou un mood que de la théorie: «croche, mais croche égale», affirme Thomas.
Généralement leur processus de création démarre avec une idée de chanson de Thomas qui sera ensuite reproduite par Antoine. Les deux vont ensuite travailler ensemble pour lécher la chanson en rajoutant des passes de guitare et de synthé. Thomas s’occupera ensuite d’ajouter un beat engageant pour tenir le tout ensemble. Leur processus de création comporte aussi un ingrédient secret: les sessions de Mortal Kombat ou de Dragon Ball Fighter Z entre les pratiques, deux des jeux vidéos préférés des deux artistes.
À travers la création de Jazz Pranksters, Boskorgï a aussi pu compter sur la participation de plusieurs connaissances musicales. Entre autres, l’auditeur pourra entendre la voix d’Ariane Moffatt accompagnée par la mélodie rêveuse de Speakeasy et Hubert Lenoir groovant sur la chanson titre de l’album.
Pour finir, il ne faut pas oublier que Boskorgï a passé le stade de groupe adolescent jouant dans le garage du père d’un des membres. Les deux musiciens ont dépassé l’étape de l’émergence. Ils font de la musique pour la simple et bonne raison qu’ils aiment ça. «On fait ça parce qu’on aime ça et si jamais ça devient pas le fun… et bien on va aller jouer à Mortal Kombat jusqu’à ce que ça le redevienne», conclut Antoine.