Efrim Manuel Menuck

Pissing Stars

Constellation Records

*** 1/2

Avec un titre d’album comme Pissing Stars, il n’y a pas de doute qu’Efrim Manuel Menuck essayait de parler le même langage que l’équipe de rédaction de Feu à volonté. Après avoir écouté son album, par contre, on confirme: lui, il ne recevra pas de lettre colérique de la part d’un membre du Caboose Band.

Faisant suite à son Plays “High Gospel” paru en 2011, ce deuxième long jeu du musicien fondateur de Godspeed You! Black Emperor et A Silver Mt. Zion explore les boucles, les cycles et l’infinité (au-delà du fa# et du la#).

Lorsqu’on pense au catalogue du musicien, une idée de pesanteur et d’amplitude sonore digne d’un grand héritier des Sunn O))) vient en tête. Cette image est mise à l’épreuve dans cet effort misant sur les textures pour faire avancer le film narratif de l’album.

L’auditeur est lui aussi confronté, dès les premières mesures de Black Flags Ov Thee Holy Sonne, pièce d’ouverture qui imite le son d’un ronflement. Peut-être ce titre est-il mis en tête d’album pour faire office d’épreuve? Il est le plus long et le plus difficile d’entrée pour l’auditeur curieux. Certains auraient pu lui préférer un LxOxVx/Shelter In Place, premier single de l’album, pour servir de mise en bouche. Une fois l’impression curieuse de sommeil profond passée, on y découvre effectivement un travail d’orfèvrerie musicale où les choeurs, les synthétiseurs et les guitares créent un panorama contemplatif magistral. L’absence quasi complète de batterie, hormis sa présence marquée, mais brouillée, dans A Lamb In The Land Of Payday Loans, est remplacée par l’effet cyclique des loops utilisés, sinon simulés, par Efrim.

Menuck propose de la musique dont la nuance survient surtout lors d’une écoute appliquée et attentive. L’album prend une forme rituelle pour laquelle le casque d’écoute est recommandé. Sinon, il se vit mieux dans la performance en direct. Peut-être même est-ce la formule optimale pour savourer son oeuvre. C’est qu’au final, la plupart des pièces terminent en fade out, ce qui sous-entend que le musicien a des idées plus riches que celles exprimées en quatre minutes sur un enregistrement. L’exercice laisse cependant l’auditeur du disque sur sa faim lorsqu’il finit par croire qu’il n’a accès qu’à une fraction de la créativité de Menuck.

The Beauty Of Children And The War Against The Poor, en fin d’album, arrive comme un soulagement d’entendre enfin une pièce qui se termine. L’enchaînement entre The Lion-Daggers Of Calais et Kills v. Lies laisse présager l’idée d’une longue fresque et d’un grand enchaînement, mais l’illusion est rapidement brisée.

Il n’en demeure pas moins que l’exercice est bien réalisé et que l’expérience est majoritairement positive. Pissing Stars est une bonne carte de visite pour celles et ceux qui souhaiteraient profiter de l’aventure Efrim Manuel Menuck en direct, mais laisse un peu sur leur faim les auditeurs qui attendent un nouvel album depuis 7 ans, surtout si l’on considère le nombre d’idées qui paraissent incomplètes puisqu’elles dépendent du fade out. L’écoute reste adéquate, voire idéale, pour les futures tempêtes de verglas que l’hiver 2018 devrait nous réserver. À vos haut-parleurs pour la prochaine occasion où le ciel décidera de pisser des étoiles.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *