On entamait tranquillement hier notre cheminement vers le printemps grâce au parcours Francouvertes. Véritable calendrier de l’avent menant à la saison du renouveau (métaphore saisonnière développée en partenariat avec Marc-André Mongrain de Sors-tu.ca), le concours commence dans un banc de neige et se termine avec les premières floraisons en mai (oui, c’est poétique). Mélanie Venditti, Shawn Jobin et Antoine Lachance étaient les premiers à tracer la voie en ce soir 1/7 des préliminaires.
Durant toute la durée du concours, on aura la chance de croiser des «ex». Pas dans le sens que vous allez devoir vous cacher dans votre foulard et vous faire pousser une moustache pour éviter d’être reconnu par la personne qui vous a brisé le coeur en 2002, mais plutôt parce que vous aurez la chance de voir d’anciens participants faire la première partie des concurrents chaque semaine. Hier Miss Sassoeur & Les Sassys, de l’édition 2016, agissaient comme pionniers.
«Si on compte pas les tests de son, ça fait exactement 363 jours qu’on est montés sur cette scène», annonce Miss Sassoeur avant d’ajouter que la foule devant laquelle ils avaient joué était aussi scintillante qu’un douchebag de Chomeday. Le quatuor ouvre le bal avec de jolies harmonies et une chanson inédite, Zéro #JulieMasse. «Merci au Roi Lion de nous accueillir», nous dit-on. Comme quoi un Lion d’Or, c’est forcément un roi.
Timide, mais avec beaucoup d’aplomb, Mélanie Venditti brise la glace des 21e Francouvertes avec son single Pompéi, un texte habillement construit et hautement poétique: «car c’est la guerre dans les tranchées de ton corps qui n’est plus ton territoire.» Beau.
Les arrangements sont extrêmement bien fignolés; chapeau aux musiciens Guillaume Guilbault, Étienne Dupré, Mandela Coupal-Dalgleish et Blaise Borboën-Léonard, qu’on connait déjà pour de multiples autres projets. Les moments d’arrêt après les puissantes ascensions instrumentales sont maîtrisés à la perfection.
La jeune auteure-compositrice mentionne la sortie de son EP, aujourd’hui, qui sera gratuit sur bandcamp pendant une semaine.
«Je suis une pauvre musicienne, mais vous pouvez prendre mon album gratuitement. Mais cette guitare-là est même pas à moi. Je voudrais m’acheter une guitare. Et la strap est même pas vintage, elle est antique.» On vous encourage à donner quelques dollars pour vous procurer l’oeuvre. Tsé.
Ayant du mal à s’accorder en parlant, car «issue du milieu classique où c’est normal de s’accorder devant tout le monde», Mélanie montre également quelques faiblesses dans la voix pas toujours juste et dans la guitare pas exactement bien accordée. Toutefois, le style unique de sa proposition à la fois rock et éthérée lui donne des points que les autres n’auront pas. Elle terminera sa prestation par sa chanson Les gyres: «c’est pas des gyros comme les trucs grecs qu’on mange», dira-t-elle pour calmer les appétits.
C’est Shawn Jobin qui prend ensuite le micro pour insuffler une petite dose de rap dans la première soirée. Accompagné par Mario Lepage (Ponteix), qui réalise la musique, il sort ses textes imagés avec une articulation qui gagnerait parfois à être peaufinée. C’est le genre de proposition qui perd rapidement son intérêt si on ne peut saisir tous les mots.
La deuxième chanson interprétée, Bordel, est rythmée par un texte éloquent:«Premier arrivé, dernier parti, on va repeindre le monde avec la couleur de la nuit». Le refrain, présentant des similarités étonnantes avec la chanson Montréal du Nouveau Rappeur (Bagel cream cheese), titillera peut-être les fans du groupe québéco-montréalais, mais les autres n’y verront que du feu.
«Si y’a des gens de la Saskatchewan dans la salle, faites du bruit», lancera le rappeur qui fait partie de la très microscopique scène musicale francophone de Saskatoon. *Sons de criquets*
Il conclura sa demi-heure avec la chanson titre de son album à paraître, Éléphant. «Des fois, on a l’impression qu’un éléphant marche sur notre vie et qu’il envoie sa trompe un peu partout. Des fois faut l’égorger.» Ok. Sa prestation est somme toute convaincante, notamment grâce aux trames rock et électro insérées dans le produit final par Mario Lepage.
Antoine Lachance ferme ensuite la marche avec sa musique à vocation Adulte contemporain à l’ADISQ. Issu du groupe On a créé un monstre, Lachance y va d’une pop aux accents rock assez conventionnelle, mais doublée de bons moments d’intensité à saveur karkwaesque.
Bien que le rendu soit somme toute assez convenu, la verve poétique de l’auteur est solide. On entend des lignes très senties comme: «Je meurs d’envie de rebâtir la petitesse de mes jours énormes.» Joli.
Fort de sa victoire à Ma première Place des Arts, il s’impose de manière articulée et entouré d’un band qui connait ses affaires.
«Y a t-il des musiciens pauvres dans la salle?», questionne le musicien avant d’entamer Une belle toune, traitant de la nécessité de faire des tounes radiophoniques. S’amorçant telle une balade, la pièce en question se poursuit avec les musiciens qui reviennent progressivement s’ajouter au produit dans un univers musical de plus en plus dense. Bon flash.
«On va se laisser sur la thématique des maladies mentales! Bonne soirée», dit le chanteur jovial avant de débuter sa dernière toune. Une fille très au fait des textes de Lachance chantera à pleins poumons la pièce comme si c’était un tube pop de Nevsky. Le mélange des énergies à son paroxysme!
Au terme du premier soir du concours, très étonnant est ce palmarès qui place la singularité de Mélanie Venditti en troisième place.