Il s’est déroulé une heure dix minutes et neuf secondes entre le moment où j’ai enfourché ma bicyclette dans le quartier Parc-Extension et celui où j’ai débarqué sur la Berge des Baigneurs à Ste-Rose-de-Laval pour assister à la dernière soirée du Festival Diapason.
Ce résultat m’apprend deux choses : d’abord, que si j’avais pris mes crédits en géographie au cégep, je serais moins propice à penser que Ste-Rose est situé à Laval-des-Rapides et vice versa. Ensuite, que malgré que j’ai également été élevé sur la rue du Tracel à Cap-Rouge, je suis encore loin d’avoir des performances cyclistes comparables à celles de David Veilleux.
Après quelques détours et mauvaises indications par des commis de dépanneur qui n’ont aucune idée où se trouve la Berge, malgré que leur commerce soit situé à moins d’un kilomètre de celle-ci, j’arrive sur le site du festival à temps pour le premier groupe de la soirée à performer sur la Grande Scène. La veille, les lavallois y ont eu droit à des performances de Kandle & the Krooks, The Muscadettes, Alex Calder et Alvvays. Ce soir, la programmation est dominée par la musique francophone avec Les Fous de la Reine, Bernard Adamus et Galaxie.
Les Fous de la Reine est un projet d’indie rock montréalais ayant gagné le Concours Diapason en 2014, leur assurant une place de choix dans la programmation du festival homonyme. Le quatuor, augmenté par la présence à la guitare de Vincent Appelby, présente avec précision leur répertoire original. On regrette cependant la piètre qualité des textes truffés de rimes faciles (« Il collectionne les miroirs/Pour ne plus voir/Tous ces regards ») rappelant les meilleurs tubes de champions en titre de Secondaire en spectacle. Le leader du groupe, dont l’attitude semble toute droit sortie d’un clip de Treble Charger, parle trop entre les pièces à un public assis qui ne semble absolument pas réchauffé par la prestation. Le claviériste Cédrick Hébert, cependant, vole le spectacle par ses harmonies vocales, bien placées et plus intéressantes que la voix principale, et ses parties instrumentales qui ajoutent une touche intéressante au matériel. Le groupe finit avec une reprise de la pièce Rock n Roll Queen de The Subways. « Y’auraient dû jouer de même toute le long! » ajoute alors mon voisin d’en arrière.
Dès que les techniciens installent les micros pour Bernard Adamus, la foule se lève et se corde devant la scène. En moins de quinze minutes, le chanteur folk et son orchestre se placent et commencent leur prestation, ce qui a laissé très peu de temps au public assoiffé de remplir leurs verres réutilisables à l’un des deux débits d’alcool sur le site. Pendant une heure, le musicien et sa troupe interprètent des titres de son album No 2, quelques classiques comme Brun et Rue Ontario ainsi qu’une reprise de Faire des enfants de Jean Leloup.
Je dois avouer que la dernière fois que j’ai vu Adamus sur scène, c’était à l’époque de l’album Brun. Pour la peine, je ne sais pas si ses musiciens de tournée sont les mêmes que pour ses spectacles entourant la sortie de son deuxième album, mais la présence d’une trompette, d’un trombone et d’un sousaphone viennent enrichir et colorer les titres traditionnellement plus folk et blues. Son classique Brun est interprété comme un titre de Ringo Rinfret (il conclue même avec le dernier refrain de Pourquoi se droguer?), Arrange-toi avec ça prend des allures de jazz New Orleans et Faire des bébés fait sortir le côté bossa nova de la chanson de Leloup. La tendance de l’orchestre vers les sonorités plus tropicales semble indiquer le chemin qu’Adamus prendra dans son prochain album à venir en septembre, déjà entamé par son dernier extrait Hola les lolos. Cette pièce est d’ailleurs bien reçue par les lavallois, notamment l’homme à côté de moi qui jouait avec les seins de sa copine. La grande classe.
Les festivaliers commencent à quitter tranquillement quand les organisateurs somment les gens de rester pour Galaxie. Si la foule est moins dense pour la performance de la troupe du Lac St-Jean, elle n’en est pas moins enivrée par le rock électrisant d’Olivier Langevin. Celui-ci a d’ailleurs réussi son défi avoué plus tôt dans l’année à l’équipe de Feu à Volonté. Si l’album avait ses aspects dansants et ses influences world beat, la prestation live décuple cette qualité. On accorde beaucoup de crédit là-dessus au trio infernal de Pierre Fortin, Jonathan Bigras et Karine Pion, qui fusionnent si bien les rythmiques associées aux musiques africaines avec les guitares fuzzées si chères au « son du Lac » qu’on croirait que Bamako est une ville voisine de Péribonka.
Galaxie est une formation puissante et virtuose, ce qui nous permet de croire sans aucun doute qu’Olivier Langevin est le guitar hero messianique dont le paysage musical québécois avait besoin. Et pour les dévots, la traversée de l’Île Jésus n’est qu’un maigre pèlerinage pour aller montrer notre allégeance à la nouvelle alliance avec le rock.
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