L’innovation musicale se fait désormais par le mélange des genres et M.I.A. l’a bien compris.
Matangi est un audacieux amalgame de sonorités modernes et traditionnelles issues de styles et de cultures diversifiés.
Le quatrième album de M.I.A., d’abord prévu pour la fin 2012, est enfin paru la semaine dernière après de nombreux mois d’attente et de conflits entre l’artiste et sa maison de disques. Bien souvent, le fait de retarder la date de sortie d’un album ne fait qu’accroître les attentes des gens, ce qui résulte malheureusement trop souvent en déception. Pour une artiste connue et acclamée en grande partie pour son caractère innovateur, il est légitime de se demander si Matangi est suffisant pour permettre à M.I.A. de continuer à être surprenante au plan musical.
Autant dans sa distribution que dans son contenu, Matangi vient confirmer une fois de plus que M.I.A. refuse systématiquement les compromis. L’album se compose de morceaux parfois sobres, voire minimalistes. C’est d’ailleurs de cette façon que l’album débute avec Karmageddon, une pièce lente et lourde qui, d’emblée, installe cette atmosphère urgente et inquiétante présente sur l’ensemble de l’opus. Les chansons de ce type ne sont pas particulièrement nombreuses et bien qu’elles soient efficaces, ce ne sont pas les plus marquantes. En fait, Matangi se caractérise essentiellement par une succession de chansons rapides, dynamiques et très chargées au plan sonore.
Matangi n’est assurément pas l’album le plus accessible et le plus facile à écouter, mais c’est le pari qu’a pris M.I.A. en présentant des chansons nécessitant une véritable attention. Le travail d’instrumentation et d’orchestration est précis et peu commun, surtout en matière d’électro/hip-hop, ce qui est tout à l’honneur de la chanteuse.
Dans l’ensemble, on peut effectivement décrire Matangi comme étant un album électro/hip-hop. M.I.A. est tout de même une artiste bien difficile à catégoriser. Au sein d’un même album, elle parvient à intégrer de nombreux styles musicaux. Elle réussit avec brio à suivre un fil conducteur tout au long de l’album et ce, même en mélangeant électro, hip-hop, rap, du reggae ainsi que plusieurs sections instrumentales traditionnelles indiennes. Très peu d’artistes, tous genres confondus, peuvent se vanter d’avoir un son et un style qui leur est propre, unique. C’est pourtant le cas de M.I.A. puisque Matangi ne sonne comme rien d’autre.
Par ailleurs, l’album prend beaucoup de valeur grâce au volet technique soigneusement travaillé. Dans l’ensemble, les structures de chansons surprennent constamment en raison des modulations très prononcées, tant au niveau rythmique que mélodique. Le montage et le mixage jouent donc un rôle majeur dans la qualité des morceaux présents sur Matangi puisque c’est ce qui permet de créer l’atmosphère et tout l’aspect lyrique de l’album.
Ce plus récent album de M.I.A. constitue un très beau mélange de genres peu communs à notre oreille. Des sonorités et des passages entiers de musique traditionnelle indienne sont fréquents et remarquablement assumés. Ces derniers sont régulièrement mélangés à des sons et des structures correspondant davantage aux standards pop occidentaux. C’est grâce à ce cocktail de genres que cet album prend tout son sens. Tout au long de l’album, M.I.A. parvient à réunir des sons et des styles complètement variés et différents, et c’est sans doute là où réside toute la force et l’intérêt de Matangi.