Déjà le dixième album que ce False Idols pour cette personnalité atypique qui se revendique en toute modestie comme le créateur du trip-hop qu’il aurait bien appelé Trick-hop.
Retour de l’incontournable bad-boy de Bristol, ex-membre de Massive Attack qui s’est lancé dans une carrière solo aussi vénéneuse que savoureuse, à savoir Adrian Thaws alias Tricky. L’homme est âpre, sans concession, une carcasse qui a subi les assauts du temps et qui sait si bien les faire partager à travers sa musique suintant le stupre et la luxure. Un album qui se veut comme un retour aux sources de ce qui a fait son succès, le diamant brut Maxinequaye qui ne nous rajeunit pas et date déjà de 1995. Pour l’actualité musicale plus récente de Tricky, son Knowle West Boy de 2008 avait marqué avec brio le retour de Tricky avant un Mixed Race un peu plus mitigé.
Maintenant, Tricky a ce pouvoir de pleinement me convaincre à chaque opus, je vous propose de percevoir ce qui fait encore le charme de ce False Idols en 10 points :
#1 Cette voix rocailleuse qui a tendance à se placer au second plan, mais se montre capable d’habiter littéralement les morceaux. Valentine, reprise très personnelle du Funny Valentine de Chet Baker, en est un bel exemple qui fait écho aux célèbres reprises de Tricky telles que le Hell is Around the Corner d’Isaac Hayes.
#2 Le talent de dénicher des voix féminines superbes (pensez à Martina Topley-Bird, Bjork, Alison Goldfrapp et j’en passe). Francesca Belmonte continue à œuvrer avec sa voix de velours (le religieux Somebody’s Sins). À noter le sosie chinois de voix d’Emilie Simon, Fifi Rong, qui illumine Chinese Interlude.
#3 Le mérite de s’attacher à des artistes de renom qui collent parfaitement à son univers. Sur Nothing Matters, Nneka et son flow entre tribal et hip-hop donne une saveur tubesque au morceau. Et que dire de la voix quasi féminine de Peter Silberman, chanteur de The Antlers, sur Parenthesis, superbe morceau tout en contrastes?
#4 Ce pouvoir de faire exploser les titres par un son âpre et distordu, le riff de guitare de Parenthesis insuffle une dose de vice face à la voix angélique de Peter Silberman.
#5 Ces rythmiques down-tempo totalement décharnées rappelant les plus grandes heures du trip-hop. Somebody’s Sins – reprise de Gloria de Patti Smith chantée par Morrison – brille par sa froideur et son ambiance quasi sépulcrale.
#6 Ces morceaux alliant parfaitement douceur et sensualité, le duo Nothing’s Changed et If I Only Knew est savoureux, entre les cordes du premier et la superbe voix du deuxième qui m’évoque Massive Attack.
#7 La capacité à surprendre et à faire les yeux doux à une pop disco-funk avec le très bon Is That Your Life.
#8 La capacité à réchauffer la cold-wave de The Cure avec We Won’t Die, reprise de A Forest.
#9 Ces ambiances de fin du monde où on sent monter une angoisse lancinante avec le superbe Passion of the Christ.
#10 Point le plus objectif et par conséquent le plus irréfutable, parce que c’est Tricky et qu’on a toujours l’impression qu’il revient de l’au-delà et qu’il a déjà des dizaines de vies derrière lui. Et parce qu’on a souvent l’impression que ce mec est une imposture musicale, mais qu’il nous désarme à chaque fois.
Morceaux préférés: Nothing Matters – Parenthesis – Nothing’s changed – Somebody’s Sins- Chinese Interlude