On avait le sentiment d’avoir la première permission à vie de nos parents pour sortir avec nos chums, au lancement de Thierry Larose dans un National bondé encore sous le joug du couvre-feu. Exalté autant que nous par tant de possibilités Thierry Larose nous a offert Cantalou comme s’il n’y avait pas de lendemain (ni de restriction quant à l’heure où on devrait quitter).
C’est parce que tout ça est vraiment excitant que Thierry Larose débranche sa guitare d’excitation à la deuxième toune. Au balcon, on remarque à peine l’accrochage, partiellement parce qu’on et trop occupés à repérer ceux et celles qui ont réussi à entrer au National avec une quelconque flasque étant donné qu’il est toujours interdit d’ouvrir les bars des salles de spectacle.
Accompagné par son ami CAO au drum ainsi que par Marie-Claudel et Agathe Dupéré, on peut dire que Larose a sorti la version A de son show ce soir. Les harmonies avec Marie-Claudel et Agathe ajoute une dimension d’exception aux chansons. «C’est jamais si bon que ça d’habitude», rigole Thierry.
Pour l’interprétation de Cache-Cou, Thierry souhaite réaliser un fantasme: «L’autre fois j’ai vu une vidéo YouTube de Kaïn en 2006. Embarque ma belle. Au dernier refrain le band joue pas et la foule embarque et c’est un hymne. Tout le monde chante. Jeunes et moins jeunes. Y’a du crowd surf pendant le bout a capella. Je voudrais reproduire ça.» Pas ce soir, Thierry. Pas ce soir.
À plusieurs reprises durant le show, on s’émerveille avec Thierry devant la grandeur des choses qui se présentent à lui. Encore tout jeune, mais infiniment sensible, autant dans son approche musicale que dans ses textes, il évolue encore en mode «découverte». «J’en reviens pas. C’est ici qu’ils font Belle et Bum», lance-t-il, ébahi.
La voix de Marie-Claudel sur L’île à vingt-cinq sous réussit à convaincre ceux qui ne la connaissaient pas d’acheter sa musique solo. Et durant toute la prestation, Thierry s’hydrate dans une gourde Gatorade recyclée: ça c’est rock.
«On m’a demandé de vous rasseoir», annonce-t-il après avoir fait lever la foule sur Les amants de Pompéi. Il n’y a certes rien de normal à ce lancement où l’on revoit des amis qui sont au moins à 3 sièges vides de nous, mais pour un instant, c’est comme la vraie vie qui fait un signe de la main pour dire qu’elle est encore là.
«Y’a le couvre-feu ça vous inquiète pas? Je voulais finir tôt de toute façon parce que ma sœur travaille demain», dit Thierry, complètement conscient des paramètres de légitimité de son concert-magique auquel on n’osait pas s’attendre.
Sur le trottoir après le concert, au lieu de vivre la course au taxi pour rentrer avant de se faire prendre, ça ressemble à un soir d’initiations d’université devant Le National. Le Couche-Tard en face fait des affaires d’or sur la bière, les gens déambulent en mode retrouvailles et évidemment, la police débarque.
C’est avec les sirènes de police en bruit de fond et la demande formelle de dispersion des troupes qu’on croise Thierry, fleuri et ravi quand même. On aura réussi à vivre le rock et à se coucher avant 22h dans la même soirée.
L’album Cantalou de Thierry Larose est disponible partout.