Je suis arrivée au Théâtre Fairmount à l’heure où la musique d’ambiance était encore pas forte. Au moment de la transition vers «musique d’accueil des gens pour qu’ils ne puissent pas nécessairement s’entendre entre eux», ma proximité avec un speaker a failli avoir raison de mon ouïe pour toujours. C’était ma première petite mort de la soirée.
Même si c’est le lancement de Mon Doux Saigneur, on connaît déjà les tounes depuis au moins deux semaines, donc tout le monde dans la salle est déjà content de savoir ce qu’il va écouter. Les fans de musiques ne sont pas des gens qui commandent le «menu surprise» dans une dinner qu’ils n’ont jamais fréquenté. Ils vivent donc cette excitation, d’enfin entendre les chansons fredonner depuis 14 jours.
Pendant qu’on patiente avec des petits gin to (ou des sodas pour ceux qui n’ont pas encore abdiqué le mois sans alcool) , on voit passer Noémie, la gérante du groupe qui est en recherche intense: l’harmoniste est porté disparu.
On comprend qu’elle l’a retrouvé, mais on ne sait pas nécessairement où, au moment un bruit de fond de musique de film de dinosaures nous laisse espérer que le show va commencer. Le tout est doublé d’un décor de film qui se passe dans l’espace et qu’on sait en avance que ça risque de ne pas finir si bien que ça (Bruce Willis va laisser sa vie).
Donc on est dans un film de dinosaures qui se passe dans l’espace et Ben Affleck qui se fait sauver la vie par son beau-père.
«Quand on est prêt, on est prêt», lance Emerik avant de commencer.
Tempérance et Aller ouvrent la soirée. «Fuck», s’écrie le chanteur avant d’interpréter Maudit. On peut donc estimer que c’est un show bilingue.
«Les amis, la famille, tout le monde est là. Les meilleurs moments. Le langage, la vie… tout est là», énumère Mon Doux Saigneur pour être sûr qu’on n’oublie personne.
Je me déplace côté cour, la zone cannabis. Les envolées de boucane me donnent du fil à retordre au point de vue de la lentille photo donc je retourne au centre pour Horizon, que je contemple au centre de la lune de manière symétrique.
Seul dans le noir Emerik St-Cyr Labbé nous interprète la seule toune triste de son album qui s’appelle ironiquement Content. Au milieu de la lune éteinte pour l’occasion on assiste à un moment qui fait lever le poil sur les bras, même des gens qui sont restés chez eux et qui ont vu l’affaire seulement sur Instagram.
Tout comme l’album Horizon qui nous fait passer vers des jours plus clairs dans la vie de l’auteur-compositeur-interprète, cette chanson nous ramène progressivement à la lumière, celle qui sait poindre à l’horizon quand plus rien ne va.
«Des fois on fait des tounes en sol», dit Mon Doux avant de commencer Patience.
Puis juste avant Aweye, il annonce: «Ceux qui ont caché des joints, c’est le temps de les allumer. On fait vraiment tout ce qu’on veut, ici!»
La sécurité n’était pas dans le coup parce que le doorman de la loge saute sur les fumeurs de pot aussi vite qu’un écureuil montréalais se lance sur un restant de pizza.
Vers la fin du show, On nous dit que «les notes ont des étoiles associées à des journées de la semaine». Si jamais vous la pognez, celle-là, écrivez-nous, mais on trouve ça très beau.
Après avoir fait le tour de son Horizon, il termine avec des cerises sur son sundae déjà bien caramélisé avec quelques surplus, dont une version jazz-jam de Chu tanné d’attendre.
Après la petite mort des speakers trop forts du début, on est mort plusieurs fois durant le show. On est mort de soif, parce qu’il n’était pas question de manquer une toune pour aller chercher de la bière. On est mort de rire quand Emerik a décousu ses remerciements. On est mort d’une petite envie de pisser pour la même raison de ne pas vouloir quitter la salle. On est mort d’amitié devant les sourires des boys sur scène. On est mort dans nos larmes pendant Content. Et on est mort des muscles à force d’avoir trop dansé. Mon Doux Saigneur nous a tué ben raide.
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