Guillaume Chiasson, le frontman de Ponctuation, nous ouvre les pages de son troisième album Mon herbier du monde entier qui pourrait être le dernier tome d’une trilogie… (ou peut-être que non aussi…)

Photo: Béatrice Flynn

N’écrit pas un album de Ponctuation qui veut! Entre une tournée internationale avec Solids, des enregistrements au Pantoum avec une dizaine de bands, des sessions sur des albums d’amis musiciens dont The Blaze Velluto Collection et Jesuslesfilles et une vie privée un peu bousculée, le frontman Guillaume Chiasson a dû puiser dans son vécu éparpillé des dernières années pour s’inspirer et concocter le troisième album de son projet principal de création, Ponctuation, qu’il incarne et pilote avec son frère, le batteur Maxime Chiasson, depuis 2011.

On s’est assis autour d’une table IKEA (on soupçonne que c’était le modèle Gerton, celui avec les pattes en aluminium; parfait pour une salle de travail) pour échanger avec Guillaume, le leader-guitariste-auteur-compositeur-homme-orchestre de la formation garage-rock pour savoir dans quel état d’esprit il était lorsqu’il s’est mis à jardiner son Herbier du monde entier qui pourrait fort bien marquer la fin d’une période-clé pour le groupe.

Un trait d’union rompu

Né d’un jam session à la bonne franquette avec son frère dans un logement de Québec au début de la décennie, le tandem familio-musical Ponctuation a toujours centré sa proposition artistique autour des sonorités garage-rock aux occasionnelles touches psychédéliques inspirées des 60’s comme le faisaient des bands comme The Sonics ou encore Count Five. Ces explorations et expérimentations les auront menés à la création de deux albums, 27 Club (2013) et La réalité nous suffit (2015), qu’ils ont présenté en tournée un peu partout à travers la province (et plus loin encore).

Au bout de ce fil de création, les deux membres se sont un peu retrouvés dans une sorte d’impasse logistique. Occupant plusieurs postes dans plusieurs autres groupes, Guillaume a dû partir de son côté autant en tournée que pour sa vie privée. Au bout de plusieurs longs mois à déambuler librement, séparé de son frère, il s’est mis à penser la suite de son propre projet sans toutefois s’imposer les balises d’autrefois. «Cet album-là, je l’ai créé de mon bord, sans même penser à ce que ça allait être sur scène. Mon frère était auparavant impliqué dans la direction artistique dans le sens qu’il me donnait toujours des cues sur ses impressions. Là, il est moins présent. En fait, il ne fera plus les spectacles», précise-t-il.

Cette simili-rupture est arrivée au bout de quelques changements quand même notoires dans leurs vies respectives qui impliquent notamment l’autoroute 20, des couches souillées et des cernes couleur charbon sous les yeux. «C’est que j’suis maintenant rendu à Montréal, ce qui compliquait déjà les choses avec mon frère (qui est toujours à Québec), mais en plus, il a maintenant deux enfants pis il a un peu perdu l’intérêt de la tournée. Il était pas un musicien à la base et ce band-là est devenu plus gros qu’on pensait. Au début, on a fait un EP parce qu’on voulait jouer ensemble, pis éventuellement, pour moi, c’est devenu mon projet de création. Étant donné que je suis à Montréal, j’ai décidé de monter un autre band ici pour la tournée avec Emmanuel Ethier (Chocolat) à la basse, Max Hébert (Les Breastfeeders) au drum, pis Tommy (IDALG) à la guitare», ajoute-t-il.

Malgré cette cassure dans le processus et la symbiose du duo, notre chanteur à la chevelure rebelle assure que ça n’a pas eu d’incidence sur la composition globale du troisième album. Maxime se retrouve tout de même sur celui-ci. «Je composais et je faisais des démos dans ma bulle. J’les envoyais à mon frère et il les écoutait de son bord. Il les a appris un petit peu au drum et après on a booké une semaine dans un studio (je travaille encore au Pantoum à Québec). On a pris une semaine pis on a tout tapé ça.»

Une semaine productive comme on les aime!

Un peu d’exil et d’errance (parce que vivre dans ses valises peut devenir suffocant sur les bords)

Sur cette palette de sonorités libres et variées, Guillaume s’est mis à coucher les pensées qui faisaient des allées et venues dans sa tête, question d’étoffer ses nouvelles chansons. Rapidement, il s’est rendu compte que l’espèce d’errance (et ses thèmes connexes) qui a marqué les dernières années de sa vie a teinté l’album de sa propre couleur. «Pendant un an, j’étais jamais chez nous. Il y a eu le départ de Québec, puis le déménagement à Montréal. Ensuite, j’ai beaucoup tourné un peu partout à travers le monde avec le groupe Solids pendant environ un an. À travers toutes ces expériences-là, j’avais toujours l’impression d’être citoyen de nulle part, de ne pas avoir réellement de chez-moi. La relation de distance était là et je me suis rendu compte que ça se transposait dans les paroles des chansons. Le nom de l’album, Mon herbier du monde entier, est venu un peu de là aussi: l’idée de cueillir des expériences un peu partout pis d’en faire quelque chose. Finalement, c’est un peu une métaphore de faire un album pour moi.»

Comme tout herbier qui se respecte, celui-ci n’a pas fait exception en rassemblant plusieurs éléments quelque peu disparates dans un seul et même tout. Cette façon de faire s’immisçait parfaitement dans ce nouveau souci de ne plus se poser de question sur la conception d’un album et de simplement laisser libre cours à la création. «Je ne pensais pas à l’homogénéité de l’album, même si, au final, y a quand même une trame de fond. Je faisais ce que je voulais. J’ai des tounes quand même heavy, des trucs vraiment punk, d’autres plus pop, certains plus psychédéliques. Des fois il y a des arrangements à ne plus finir. Je n’avais pas de contraintes. C’est définitivement moins épuré et plus éclectique. Y avait aussi une volonté d’aller ailleurs. Je voulais pas me répéter», ajoute-t-il.

Vers les points de suspension…

Dans le monde de la ponctuation (celle dans le sens littéraire, pas le band, là) on utilise notamment les points de suspension lorsqu’un auteur veut marquer une pause. C’est un peu dans cet esprit que Guillaume se trouve à la suite du départ de son frère du groupe et au bourgeonnement créatif du band. Sans dire que c’est la fin, le frontman avoue qu’il sent qu’il est arrivé au bout de quelque chose pour le moment et qu’il a les yeux rivés sur d’autres avenues. «J’dirais jamais que c’est la fin de Ponctuation, je pense que c’est un projet qui va probablement continuer à un moment donné, mais pour l’instant, ça se peut que ce soit sur la glace puisque j’ai déjà d’autres projets (dont j’peux pas parler), mais qui vont devenir importants. Je ne me donne jamais de balises. Je veux y aller au feeling. Si je veux que ce soit un album de Ponctuation, j’vais le faire, si c’est autre chose… »

En attendant, on peut tourner les pages de Mon herbier du monde entier et vivre le moment!

Ponctuation et son line up renouvelé passeront dans de nombreuses salles à travers la province au cours des prochains mois afin de présenter les nouveaux morceaux de ce troisième album. Le band prendra également les offres qui passeront pour ce qui est des festivals cet été. Pour plus d’infos, ça se passe pas mal sur leur page Facebook.

Le nouvel album, Mon herbier du monde entier, est présentement disponible dans les bons magasins (ceux qui sont encore ouverts) ainsi que sur les fameux internets de la vie.

Puisque Ponctuation est un peu arrivé au bout de quelque chose aux yeux de Guillaume, son créateur principal, on surveille de près la forme que prendra la suite des choses.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *