Après deux soirées de petite jeunesse, j’ai décidé, hier, de me confronter à une foule plus mûre sur les Plaines lors du très nostalgique show des Who, qui entamaient à Québec leur nouvelle tournée sur le continent américain. Retour sur une soirée pleine de vieux.
Surprise et étonnement: en arrivant sur les Plaines à 18 h 15, je m’attends à me retrouver pris derrière une interminable file d’attente et à potentiellement manquer le début du show. Que nenni: il n’y a presque personne sur le site à mon arrivée. Profitant de cette rare occasion, je vais me bencher directement à l’avant du stage. Ça l’air que les Who attirent un public qui aime bien souper avant de sortir.
Ce sont les très canadiens The Dirty Nil qui ont la tâche de réchauffer le public disparate. Faisant dans le Weezer et un genre de résumé de tout ce late 90’s rock que j’ai manqué en étant semi-né, le band a un peu de difficulté à venir me chercher. C’est qu’on dirait qu’on connaît déjà toutes les chansons sans pourtant jamais les avoir entendues une seule fois. Le genre de band qui doit scorer aux Juno, mais pas au Québec dans le fond. Le seul bout où je réussis vraiment à triper fort, c’est durant le cover de Surrender de Cheap Trick qui vient conclure le set. Ceci dit, il y a quand même du bon chez le Nil sale: leur bassiste, lorsqu’il porte des lunettes de soleil en forme de coeur, ressemble étrangement à Paul Cèxe et utilise même une panoplie de moves s’apparentant à ceux de la star québécoise. Comme quoi les 40 années et plus de carrière de ce dernier auront réellement servi à inspirer une génération. Sinon, le style rock assumé du chanteur est aussi à souligner, lui qui chante et joue en mâchant de la gomme balloune et ne boit qu’un litre de Nicolas Laloux directement à la bouteille pendant tout le show.
C’est ensuite à la bande anglaise des Struts de prendre le relais. Visiblement de plus en plus habitué à des grosses scènes de festival, le groupe ne semble pas intimidé à son entrée sur scène et occupe bien l’espace pour nous pitcher son néo-glam efficace directement au visage. Avec ses allures de Freddy Mercury hipster, le chanteur Luke Spiller prend bien le temps d’énergiser la foule avant de lancer une batch de chansons que les fans de CHOM auraient reconnues sans aucun problème. Si le public de Québec semble moins à l’aise avec le catalogue, il ne se fait toutefois pas prier pour danser un peu et participer dans la bonne humeur. Tout en sueur, Spiller teste quelques costumes, alors que le reste du groupe semble s’être habillé chez Eva B, un bonus selon moi. Après 40 minutes bien remplies et presque sans temps morts, le groupe promet finalement de revenir bientôt, confiant au passage aux Plaines maintenant bien remplies qu’il préfère le public nord-américain aux Anglais. Les gens semblent bien heureux du compliment.
Après une demi-heure d’attente, c’est maintenant le temps du CHSLD anglais de The Who de venir visiter Québec. Faisant tous leurs 70 ans avancés, sauf John Entwistle qui a inexplicablement l’air d’avoir rajeuni depuis sa dernière tournée, le groupe en arrache un peu sur les premières chansons. Après nous avoir avertis de ne pas fumer près du stage pour ne pas provoquer d’allergies chez Roger Daltrey et de nous gâter sur les muffins au pot, puis de «Rester calme here come The Who» avec des grosses projections en typo laide, les gars sont peu loquaces. Pete Townshend semble aussi pris d’Alzheimer soudain, alors qu’il n’a plus trop l’air de comprendre l’ordre de son set de pédales. Finalement, tout s’arrange et les hits début-60’s s’enchaînent en ouverture. À Join Together, le solo de guimbarde me fait comprendre la très grande influence de Mes Aïeux sur le band, et je me dis que l’arrière-grand-père devenu millionnaire et ayant connu l’époque yéyé de Stéphane Archambault est probablement Roger.
Sans arrêter d’alterner entre des After Effects laids et des images d’archives très cool en guise de projections, le mythique groupe se rend éventuellement jusqu’à Quadrophenia, qui ne sera malheureusement pas diffusée en quadriphonie sur les Plaines. Dommage que l’organisation du festival ait sous-estimé le potentiel de cette sonorisation si efficace, rentable, et ayant bénéficié d’une durée de vie exceptionnelle. Au moment où je pense au savoureux gag suivant pour mon retour («Ils ont vraiment tous l’air sur le bord de mourir, surtout Keith Moon»), un hommage vidéo à Moon, mais aussi à John Lennon, est présenté au public et je me dis que je devrais garder le tout pour moi, par respect pour les morts.
La fin du show se révèle particulièrement forte en succès, avec l’enchaînement Pinball Wizard / Baba O’Riley / Won’t Get Fooled Again. Roger commence aussi à retrouver un peu de sa voix égarée dans les limbes de la vieillesse, pour notre plus grand plaisir collectif. Après avoir fait semblant de se piquer à l’héroïne sur Baba – probablement un hommage caché à CSI –, il réussit à pousser à la perfection son cri de mort sur WGFA et le public ne se peut plus. Je m’inclus d’ailleurs dans le public à ce moment-là. La soirée se termine là-dessus et il est finalement déjà trop tard pour aller voir Big Brave, ma seule déception. Je me gâterai dans le métal demain de toute façon.
Citation de la soirée: «Kent Nagano!» – Un dude en voyant le vieux pianiste chinois du band sur les écrans géants pendant l’intro de Love, Reign Over Me. J’ai ri fort.
Programme de demain: Metalord, Voivod, mes impôts, mes taxes, Metallica, Jacques Greene.