C’était noir de monde sur le trottoir, rue Saint-Laurent, au coin de Beaubien, pour le spectacle Patache! : Cloaque Drum Solo, qui inaugurait l’Espace des Mêmes, le centre de diffusion multidisciplinaire du collectif Les Mêmes-Cacaïstes. Exploration d’une nouvelle salle pour voir si c’est, effectivement, le même cac’ que partout ailleurs.
Accueillis par les bonnes gens du festival SOIR, binôme sympathique qui a enflammé Beaubien entre la Main et la Plaza en août dernier, on entre dans une tanière résolument artsy. Grands murs blancs et rideaux en macaronis devant la scène, le public remarque surtout l’infrastructure constituée d’éléments d’un drum et de morceaux de gingembre attachés à des ice packs. Un élément qui deviendra sans doute en jeu plus tard dans la soirée.
La salle se remplit tôt, ce qui est bon signe pour les organisateurs. Leur commandite de chez Farnham tombe d’ailleurs rapidement à sec. Programmation de feu ou effet d’entraînement? Sûrement un mélange des deux. Mais il faut rappeler que des rumeurs de mécénat par un certain dragon, qui a donné de la visibilité aux Mêmes-Cacaïstes, peuvent avoir alimenté l’engouement. Depuis 2016, on laisse tomber le James Hyndman Money; ce qui compte, c’est le Taillefer Money.
À 20 h bien précises montent sur scène les musiciens de la formation Opale. On y reconnait certains membres du noyau du rock planant déconstruit qui trouve sa sensibilité chez le public francophone (les Autruche, Eliza, Jackson Pulloff, Pandacide de ce monde, on vous salue!) et, en quelque sorte, réussit à se retrouver dans cette niche. Les compositions ne se distinguent pas pour leur fougue et leur animalité incendiaire, mais elles touchent au bon endroit. Si la chanteuse Naomie De Lorimier a déclaré, en les rejoignant sur scène, qu’Opale est sa révélation de l’année, on ne peut pas encore assurer pour l’instant que l’on partage son opinion sans équivoque. Encore faudrait-il savoir si on parle de 2017 ou 2016. Cependant, tout est toujours une question d’état d’esprit et de lieux de rencontre.
On constate que la volonté artistique de la performance, souhaitée par les organisateurs, n’est parfois pas toujours foncièrement compatible avec l’objectif. On salue les rideaux en tortellinis, mais ça bloque un peu les projections. Voici donc les projections proposées pendant Opale, selon l’ordinateur du projectionniste.
El Salvador s’annonçait être le moment fort pour la découverte musicale. Le duo expérimental, mélangeant guitare, percussions et autres glitchs a tout pour annoncer la teneur musicale de la soirée de même que l’esthétique de rigueur. Cependant, l’absence de basse donne un rendu sec, cassant et peut-être un peu plus rébarbatif que leur musique expérimentale réelle.
Leur performance est entrecoupée du fameux Patache! : Cloaque Drum Solo, impliquant des cacaïstes et la fameuse structure. Placés à l’opposé de la salle, par rapport à la scène, seuls quelques initiés peuvent avoir accès au visuel complet. Si l’un, haut perché dans sa chaise, fait le fameux solo de batterie, les gens à l’arrière ont peine à comprendre ce que l’autre scie avec une scie électrique.
Fin de performance pour El Salvador. En voulant m’asseoir, je réalise que le seul sandwich au rôti de porc du dépanneur Lalime, voisin de la salle, n’est pas assez pour ma contenance et je fais quelques chutes de pression de suite. Cet événement me fait réaliser quelques inconvénients de l’aménagement: victimes de son succès, l’espace peut être inadéquat avec son unique toilette difficile d’accès. L’absence de bouteilles d’eau fait également réaliser que le seul point de ravitaillement est le même pour les assoiffés que pour ceux qui ont ingéré trop de liquide. En somme, pas nécessairement la meilleure soirée pour commencer la mescaline en cachette aux cabinets.
En complémentaire: les projections pour El Salvador.
Le Havre est une formation des plus impressionnantes du paysage montréalais à voir en direct. J’aurais préféré ne pas passer la moitié de leur perfo dans la file pour les cabinets. Le rendu, entendu par l’arrière de la scène, est néanmoins saisissant.
Halte au dépanneur pour acheter une bouteille d’eau et vaincre mon malaise. Discussions avec les nombreuses personnes refusées à l’entrée. Zen Bamboo vient casser la baraque, ou plus littéralement, vient se débarrasser du rideau en rigatonis.
Plus bamboo que zen, la formation montre un College Rock grungy, bien flexible dans les genres, qui respire un peu l’énergie du Cégep Saint-Laurent. La direction stable des titres est laissée au profit de la vivacité et de l’expérimentation. Ce genre de proposition me rappelle toujours un peu Le Pensionnat des établis de (feu) Karkwa, en ce sens où la direction n’était jamais claire, mais le talent bien présent. Par exemple, on fait référence aux Strokes, à la sauce montréalaise (New York City Cops porte désormais l’uniforme du SPVM), mais peut-être sommes-nous trop critiques. Le public danse et s’embrasse à qui mieux mieux, à bouche que veux tu. La volonté College Rock à son meilleur. Qui sommes-nous pour blâmer?
Nous y reviendrons, à cet Espace des Mêmes. J’aurais aimé y avoir mieux accès à un point d’eau, mais si c’est la seule critique qu’on y trouve, c’est qu’on cherche une aiguille dans une botte foin. Ou encore un point d’eau dans le Sahara. Ou le Mile-Ex. C’est rendu qu’on ne sait plus où on en est géographiquement. Ma pression est en chute libre.
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