Réunir les musiciens Chantal Archambault et Michel-Olivier Gasse dans un groupe bicéphale, ça donne Saratoga. Ils amènent leur folk épuré et feutré — ainsi que leur attitude craquante ! — aux Francofolies dans le cadre du lancement montréalais de leur premier EP, intitulé Saratoga, le samedi 20 juin à 17 h.
Les deux auteurs-compositeurs-interprètes reviennent du Festival de la chanson de Tadoussac où ils ont lancé leur mini-opus devant des spectateurs agglutinés les uns contre les autres dans une verrière d’hôtel pleine à craquer, sous le soleil ardent.
Chantal Archambault, qui nous a livré deux albums ainsi qu’un EP, et Michel-Olivier Gasse, bassiste aux côtés de ladite Chantal, Vincent Vallières ainsi que Dany Placard et membre du groupe Caloon Saloon, se réjouissent de la confiance qui leur a été octroyée pour présenter le matériel intimiste et acoustique de Saratoga aux Francos. « Lorsqu’on a lancé le projet il y a quelques mois, les programmateurs se sont immédiatement montrés curieux et enthousiastes, même avec une seule chanson mise en ligne », indique l’auteure des albums La romance des couteaux et Les élans.
Conçu pour être présenté dans un contexte intime — salons, petits endroits anodins qui ne sont pas forcément propices à des prestations —, leur spectacle, mis en branle ces derniers mois, préservera sa facture minimaliste — une guitare, une contrebasse, un harmonica et un micro — mettant à l’honneur les cinq chansons du EP ainsi que certaines tirées de leur répertoire respectif.
Ils devront par contre, faute de temps, écourter le « parlage », partie intrinsèque du spectacle de Saratoga, parsemé d’histoires qu’ils récitent différemment au gré des soirs. « Elles varient selon le pouls de l’assistance, mentionne Gasse. Les grosses lignes sont définies, mais le “ parlage ” prend diverses proportions selon la vibe de la foule. »
Y’a eu des partys et de la débauche, là-dedans !
Un spectacle inusité, donné l’automne passé aux côtés des musiciens Keith Kouna et Philippe Brach, a semé chez eux le désir de former un groupe à deux. Le tandem jouait le matériel d’Archambault dans une résidence érigée au cœur des bois, en Estrie. Une contrainte technique les obligeait à chanter — un peu mal pris — autour du même micro. « On était tellement proches, collés sur ma contrebasse, que les gens ont capoté ben raide », se souvient Gasse. Après ça, on s’est saoulés ! Cette maison de millionnaire construite en 1969, super moderne à la seventies, avec des paliers ouverts et du tapis partout, était hallucinante ! Y’a eu des partys et de la débauche, là-dedans ! »
Les commentaires emballés sur cette symbiose spontanée ont fusé… Ils tenaient là un filon. « Le public a fait germer quelque chose ce soir-là », estime Chantal.
L’idée d’un spectacle est née ; leurs deux répertoires se conjuguant à merveille, des possibilités en découlaient. « Tranquillement, on a commencé à écrire des chansons, on s’est ensuite dit qu’on pourrait enregistrer…, raconte Gasse. En ce moment, les chansons déjà existantes occupent une bonne place de notre show, mais on continue à écrire… parce que c’est trop beau ! »
Une musique sans fioritures
Les complices avaient envie d’une musique aux arrangements dépouillés, qu’ils pourraient trimballer n’importe où, sans restriction de matériel ou de circonstances, marqués par un séjour à New Orleans, où les foyers vibraient au son de la musique. « On a été renversés de voir à quel point elle faisait partie du quotidien. Les gens jouaient soir après soir, se remémore Chantal. On se disait : “ C’est donc bien plate d’attendre après des conditions pour jouer devant les gens. ” »
Ils souhaitaient une musique sans artifices, comme la qualifie Gasse, qui se rendrait au public sans barrière, dans un climat de proximité. « Et qu’elle soit l’fun pareil ! renchérit Chantal. Que les gens constatent qu’on n’a pas besoin de grand-chose pour être bien, qu’ils réapprivoisent la musique épurée, comme ça se faisait dans le temps lorsque la mère ou le grand-père sortait le violon. Ça ne se fait plus, mais nous, on le fait ! Et c’est vraiment tripant ! »
Grâce au minimalisme des prestations de Saratoga, le duo savoure les rencontres qu’occasionne la tournée, tisse des liens plutôt que de consacrer du temps au test de son — très court dans leur cas, voire inexistant. « À la place, on passe du temps en compagnie de ceux qui nous reçoivent : on soupe avec eux, on vit le show avec eux, on prend un verre avec eux et on couche chez eux ! s’exclame Chantal. On entre dans le vécu des gens, et ils entrent dans le nôtre. »
« On se retrouve à faire de méchantes rencontres, poursuit Gasse. On a donné huit shows en huit jours sur la Côte Nord en mai, dans des salons et des gîtes, devant une assistance de 15 à 40 personnes. On s’est peut-être pas enrichis, mais on est revenus le cœur ben gros et ben ouvert. Le monde était tripant, jamais irritant. Cette proximité, c’est ce qu’on recherche avec le projet. Les gens s’approprient le show ; ce public super fidèle et attentif crée une pierre d’assise. On part sur des bases humaines vraiment solides. »
Une nouvelle priorité
Les deux parties acquiescent : composer des chansons pour Saratoga est désormais prioritaire. « On est vraiment tombés sous le charme de notre propre projet ! s’esclaffe Chantal. On le chérit, on désire l’alimenter et l’enrichir. On veut poursuivre cette aventure de proximité-là. Même si on jouera aussi dans de plus grosses salles, on continuera à jouer lors de mariages, dans des salons. Le fait d’être seulement deux se prêtera toujours à la formule intimiste réduite, ce qu’on ne peut pas forcément s’offrir avec un band. Hé bien la nôtre l’est d’emblée ! »
Et puisque les complices de longue date partagent le même toit, inutile de tergiverser au téléphone ou en se concertant à plusieurs. « C’est la première fois que je peux dire : “ Est-ce qu’on jamme dans la cuisine ? ” C’est plaisant de jouer de la musique avec la personne qu’on aime », admet Chantal. « On a tenté de cultiver une petite aura de mystère au début, mais on a été incapables de la préserver ! » rigole son homme.
Un show de « ti couple », il en était absolument hors de question. « On refusait que les gens se disent : “ Bon, un autre couple ! Ah qu’ils sont fatigants avec leur bonheur ! ” Notre projet est rempli de sincérité, affirme tendrement Chantal. Je pense que le public apprécie notre simplicité, notre désir de se rapprocher de lui. On ne joue pas de game, on ne veut pas flasher ou avoir l’air de quoi que ce soit. On fait juste ça pour… » « L’amour », de répondre Gasse. « Oui, l’amour de tout : de la musique, du monde et de nous-autres ! éclate de son rire cristallin Chantal.
Leur chimie, forgée par la musique et la scène, existait en effet bien avant leur couple. « À chaque fois que Chantal descendait de Val d’Or où elle habitait, on avait une date, relate Gasse. On s’entendait bien. » « On était de très bons amis », corrobore Chantal. « Là, c’est fini, on n’est plus des amis », rétorque Gasse. « C’est ça ! » pouffe sa douce.
Saratoga, c’était simplement le cours des choses. « Tout allait de soi. Des fois, lorsque tu ne forces pas les choses, c’est bon signe, croit Chantal. Ce projet-là, il coule, le public embarque. On est vraiment choyés dans la vie. Il faut le reconnaître lorsqu’il nous arrive de belles choses. » « On va conquérir les gens un cœur à la fois », d’ajouter Gasse. « C’est drette ça ! approuve la rousse chansonnière. On va chercher les gens, un par un. “ Un cœur à la fois ”, t’es ben cute ! C’est Gasse. Bienvenu dans le monde de Gasse ! »
Saratoga sera en prestation le samedi 20 juin à 17 h au Pub Rickard’s (angle des rues De Bleury et Sainte-Catherine) à Montréal. On peut se procurer leur EP Saratoga à saratoga.bandcamp.com. Pour connaître les dates de tournée, visitez saratogamusique.com.