Le but principal du Pouzza Fest est de célébrer le lien de communauté entre les gens s’associant à cette scène musicale, et ce, quitte à déroger au célèbre mantra «fast food, fast music» en offrant un brunch gourmet aux festivaliers.
C’est donc sur la bucolique terrasse arrière des Foufounes électriques que je savoure mes patates, ma crêpe et mon tofu brouillé (3 $ pour un tel régal – de quoi faire rougir les propriétaires du chic Blanche Neige sur Côte-des-Neiges) et que j’écoute la performance du chanteur vancouverois Jesse LeBourdais.
Un dimanche midi comme il s’en fait peu. Cependant, l’idée n’est pas uniquement de profiter d’un tel festin de pacha, mais aussi de discuter avec Till Lemoine, chanteur, guitariste et membre fondateur de la formation parisienne Guerilla Poubelle.
La veille, le 16 mai, sa formation offrait un concert où leur premier album, Il faut repeindre le monde…en noir, a été interprété dans l’intégralité pour célébrer son dixième anniversaire de parution. «En France, le disque n’est jamais sorti en vinyle, donc pour les dix ans, on s’est dit qu’on allait le faire. Du coup, en en parlant, on s’est dit que ça serait rigolo de faire un set avec que ces chansons-là», relate le chanteur.
À partir de cette idée, Guerilla Poubelle a commencé les préparatifs pour cette performance anniversaire. Le projet devait initialement être présenté qu’à This Is My Fest, cousin spirituel du Pouzza, organisé par Till, qui se déroule du 22 au 24 mai 2015. Après réflexion, ils ont profité de l’occasion pour soumettre le projet à Jessy Fuchs de leur label québécois, Slam Disques. «Comme on n’allait pas venir en tournée cette année, on en profite pour venir un peu au Québec. C’est un peu comme notre deuxième maison», mentionne Till.
Tout comme en France, le concert a servi à souligner la parution en terres d’Amérique de l’album Il faut repeindre le monde…en noir en format CD et vinyle. Comme Slam Disques ont fait paraître les deux opus suivants, Punk = existentialisme et Amor Fati, il allait de soi que la distribution du premier album se fasse avec cette équipe et surtout, de la bonne manière. «Il était sorti à l’époque, mais avec un label d’un gars qui a disparu. Je ne me rappelle plus de son nom ni du nom de l’étiquette, explique Till Lemoine. Il y a des copies qui circulent, mais elles sont bleues et non vertes. C’est un dude qui a disparu avec nos disques.» Après enquête, il semblerait que cette rare relique a été produite par Les Disques électrochocs. Si jamais tu nous lis, Derrick, on aimerait savoir ce que tu deviens depuis. Ça m’intéresse.
Cette distribution, bien qu’obscure, a tout de même permis au groupe de se faire un nom dès ses débuts au Québec. Le premier album n’a peut-être pas été écoulé à plus de 20 000 exemplaires, comme en Europe, mais il y avait néanmoins plusieurs fans de première heure. «C’était la première fois qu’on venait. On se disait que c’était normal qu’il n’y ait pas grand monde, mais on nous disait que cinquante personnes un mardi soir pour un show punk, c’était vraiment bien», se souvient le principal intéressé. Le public est aussi resté fidèle au vieux répertoire.
D’ailleurs, est-ce que ces pièces sont toujours aussi appréciables après dix ans? «De se replonger dans cet album-là, ça nous a donné envie d’en rejouer, d’en rajouter au set, dit-il. On essaye de garder une espèce d’équilibre entre toutes les périodes. On va faire environ 5 chansons de chaque album.» Et l’exercice a été fortuit, même s’il s’est parfois avéré hasardeux. Certaines pièces n’ont été qu’enregistrées puis plus jamais jouées. «On s’est mis un peu en danger», ajoute Till.
Souhaitons-leur le meilleur pour la performance du vendredi 22 mai prochain, à Paris, qui est déjà à guichets fermés, à la grande surprise d’un anglophone étourdi assis à notre table. Parce que dix ans plus tard, il faut encore repeindre le monde. «Les choses négatives, c’est important d’en parler. De ne pas garder ça en dedans. C’est un peu ça que ça va dire. C’est important de faire ça, même quand ça va bien. – La période n’est pas plus salutaire en ce moment. – Non non. La vie c’est toujours aussi nul», conclut le chanteur, en riant.
Question bonus
S’il faut repeindre le monde, c’est quoi ta marque de peinture préférée?
«Je ne sais pas. Je crois qu’on n’a pas les mêmes marques qu’ici, de toute façon. J’utilise beaucoup de Posca. C’est comme des gros Sharpies avec de la vraie peinture. Des gros marqueurs comme utilisent les taggeurs. On utilise beaucoup ça en tournée.»