Les porte-parole des 18e Francouvertes, Karim Ouellet et Les sœurs Boulay, ont joué les premières notes de cette soirée de finale extrêmement riche de talents qui se déroulait hier au Club Soda. Tannées, disaient-elles, de chanter toujours les mêmes chansons, Les sœurs Boulay y sont allées d’une nouvelle composition, Les couteaux à beurre (on a hâte à un nouvel album). Karim Ouellet nous a plutôt ramenés à l’époque où il faisait lui-même partie des concurrents des Francouvertes, en interprétant une chanson de son premier album, Plume. Le trio de porte-parole a conclu la première partie en interprétant à trois Marie-Jo, une pièce de Karim.
Pas facile de réchauffer une salle remplie de personnes munies de crayons et prêtes à juger la musique de toutes leurs forces. C’est à Philippe Brach qu’on avait assigné la tâche d’injecter un peu de vie dans une foule plutôt froide.
Avec une attaque tellement entrainante au début de chaque pièce, il nous a fait retomber en amour avec chacune des ses compositions, des textes sensibles et abrupts, tantôt livrés avec un brin d’humour dosé, tantôt lancés comme une tonne de briques en nous laissant muets devant son regard sur le propos.
Une chose est certaine : il y a quelque chose dans l’espace-temps qui s’arrête quand Phil Brach pousse une note aiguë du plus profond de sa gorge en fermant les yeux. Un son qui te fait sourire ou pleurer dépendamment de l’état dans lequel tu accueilles la toune. En commençant son set avec les deux chansons les plus douces de son répertoire, Alice et Ressac sur ta peau, il a établi le contact : un lien fragile de complicité où il se dévoile à celui ou celle qui veut bien l’entendre. Il a ramené bien vite sur le plancher des vaches tous les auditeurs qui auraient pu se laisser captiver par le pointage du CH sur leur téléphone avec son sens du rythme et sa façon de nous faire sentir comme s’il était broche à foin au moment où il pousse au contraire la pièce la plus tight de la soirée.
Le nuage envoûtant de Julie Blanche, qui a obtenu la seconde place sur le podium, a ensuite paralysé la foule dans un sentiment confortable d’abandon. La sincérité du tourment qu’elle partage avec celui ou celle qui l’écoute est saisissante. On sent un genre d’agressivité retenue et libérée peu à peu pendant que chaque chanson avance. La performance amenée sur la scène pour la finale était clairement ponctuée d’un travail colossal sur la présence scénique. Les yeux bien ouverts de la chanteuse semblaient s’adresser à moi, toi et toi. Tout le monde était dans la bulle charmante de Julie Blanche, entourée une fois de plus de son band dramatiquement talentueux pour faire naître les ambiances.
Le rock mathématique de Deux pouilles en cavale a bouclé la boucle de cette édition du concours. Avec une précision toujours aussi calculée, les trois musiciens ont livré leur meilleure performance de la saison des Francouvertes. Cette audace électrifiée prenante et gorgée de génie musical ne remportera malheureusement jamais un concours comme les Francouvertes, mais la drive du trio nous donne envie de partir un concours qui leur irait comme un gant.
Photos par Élise Jetté
Pour revoir notre entrevue et perfo avec le gagnant, c’est juste là :