Mosquito by Yeah Yeah YeahsYeah Yeah Yeahs
Mosquito

Interscope Records
États-Unis
Note : 7/10

Si Yeah Yeah Yeahs incarnait l’électro-rock-pop éclaté avec ses précédents albums, il en est tout autre sur Mosquito. Le groupe de New York présente des mélodies plus sombres et plus intéressantes pour leur construction que pour leur aspect punché.

J’ai aimé écouter Yeah Yeah Yeahs (surtout It’s Blitz!) en voiture, les fenêtres baissées, en terminant de travailler les vendredis soirs. À l’époque, j’avais une Honda Civic blanche avec un gros sticker rose à l’arrière, pas de power steering. Une 1991, elle faisait mon âge (mon unique voiture à ce jour, très Laval). Yeah Yeah Yeahs, alors que j’étais encore au cégep, ponctuait donc mes débuts de soirées et week-ends. Leur musique représente depuis pour moi la liberté des soirs d’étés conjuguée au sentiment d’infinité qu’on peut ressentir à 18 ans.

Aujourd’hui, mon petit bolide a rendu l’âme et les vendredis soirs se font en autobus comme tous les autres jours de la semaine. Je me laisse donc guider par les aléas du transport en commun, bien souvent pour le mieux. Et les soirs d’étés, je prends mon vélo, c’est bien plus amusant, il n’y a pas de fenêtre, mais pas de musique non plus….

Pourquoi faire un détour sur les moyens de transport et l’évasion? Parce que Mosquito évoque un cynisme et une résilience par rapport au quotidien qui laissent froid à la première écoute. Par exemple, au-delà de ses bruits de wagons de métro en écho, le morceau Subway, lasse, nous fait éprouver la déprime des lundis soirs. Celle d’un trajet interminable où d’un œil à demi ouvert on analyse les gens autour sans vraiment porter de jugement.

Les ambiances variant d’un morceau à l’autre donnent l’impression de traverser la semaine en 40 minutes ; de la maison, au claquement des pieds dans la rue vers le boulot, passant par les rires dans le parc, le brouhaha des bars et le calme de la nuit. En portant l’oreille, on le décèle clairement.

Au-delà des sons d’ailleurs, les textes ont une connotation à un moment épuisé, à un autre désillusionné et parfois même angoissant. On s’y retrouve seulement avec des noms de chanson comme Slave, Wedding Song et Despair, mais à titre d’exemple, sur These Paths, Karen O chante d’une voix vaporeuse «These paths we’ll cross again, again, these pants rubbed off against, against…Take your piece or you’ll starve, take your piece, take it kid».

Sacrilège et Mosquito plus rythmés, rappellent les derniers albums. Area 52, plus rock, aux accords de guitare distortionnés et aux échos de bruits industriels, est lourde à l’écoute. Buried Alive laisse place à un segment rap un peu surprenant, mais pas mauvais. Cependant, dans l’ensemble, Mosquito demeure surtout composé de morceaux plus doux, répétitifs et ambiants comme Always.

Alors que Yeah Yeah Yeahs excellait à rendre l’infinie atteignable avec ses mélodies vibrantes, le groupe de New York fait maintenant revivre un quotidien parfois banal, parfois anxieux, tout en dénonçant l’absurdité de l’existence.

L’effet est tel qu’on peut seulement vanter l’album. Il est bien ficelé et il réussit vraiment à nous transporter avec honnêteté dans l’univers du groupe aux fils des sons et ambiances scellant chaque thématique.

Mosquito déstabilise. Difficile de dire s’il est marquant : ses mélodies ne le sont pas vraiment, mais il lance un message lucide et clair qui ne peut qu’être compris et écouté.

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