Godspeed You! Black Emperor
‘Allelujah! Don’t Bend! Ascend!
Constellation
Québec
Note : 8/10
Dix ans. Dix longues années à réécouter les Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven, Yanqui U.X.O. et autres albums des excellents Godspeed You! Black Emperor. Dix longues années à se dire que ce groupe a marqué son époque en créant une musique intemporelle qui mériterait un plus large public. Dix années à comprendre l’héritage laissé par ces Montréalais au monde du post-rock. Et voilà que soudainement, le groupe, reformé depuis deux ans, annonce un nouvel album, ‘Allelujah! Don’t Bend! Ascend!. La meilleure nouvelle de l’année 2012.
La musique de Godspeed You! Black Emperor a toujours eu une connotation politique. Bien entendu, ce sont des musiciens, pas des politiciens, et comme ils l’ont si bien fait remarquer dans une (rare) entrevue donnée au Guardian en début de mois, «all music is political, right?». Mais leur son s’est toujours démarqué. À une époque où les rythmes radiophoniques dominent, avec leurs mélodies génériques prêtes à consommer, Godspeed You! Black Emperor s’est inspiré de la musique classique en présentant des pièces très longues, divisées en sections. Déjà, le «statement» était puissant.
Arrive ‘Allelujah! Don’t Bend! Ascend!, en automne 2012. Après l’effervescence politique du printemps érable, difficile de ne pas établir de lien entre cet album et la crise étudiante. Disons qu’avec une chanson titrée Strung Like Lights at Thee Printemps Erable et des bruits de casseroles sur le morceau Mladic, cette idée se retrouve renforcée.
Qu’en est-il de la musique? ‘Allelujah! Don’t Bend! Ascend! oscille entre le post-rock, le drone et le noise, comme Godspeed You! Black Emperor a toujours su le faire. C’est ce qui démarque ce groupe de tous leurs descendants; être en mesure de reprendre les concepts de base du style musical, tout en y apportant une touche personnelle, unique.
Mladic est connue depuis un moment déjà puisqu’on a pu l’entendre sur scène. Mais c’est toujours un plaisir d’entendre cette décharge électrique d’une vingtaine de minutes, propulsée par un mur de son implacable, qui se transforme en montagnes russes vers la neuvième minute. Godspeed You! Black Emperor utilise ici le crescendo de façon extrêmement efficace. La montée en puissance s’étend sur plus de 15 minutes, avant de décroître tranquillement.
Their Helicopters’ Sing et Strung Like Lights at Thee Printemps Erable sont de purs morceaux drone, remplis d’inquiétude et d’hostilité. Le groupe n’a pas cessé de composer des trames sonores apocalyptiques malgré toutes ces années d’absence.
We Drift Like Worried Fire démarre en douceur, jusqu’à ce qu’une guitare fuzzée déchire l’atmosphère pesante et la transforme en hymne instrumental. Mais un breakdown au milieu du morceau fait dériver la mélodie jusqu’à une finale très rock.
Allelujah! Don’t Bend! Ascend! n’est pas le meilleur album de Godspeed You! Black Emperor. Disons simplement que ce disque a tout à fait sa place dans la discographie du groupe. Il a aussi tout à fait sa place dans l’espace musical moribond de 2012.
Godspeed chers amis. Godspeed.