Après nos quelques mentions honorables, voici les positions 10 à 6 de notre palmarès des 10 albums ayant marqué l’année 2010.
#10 : The National – High Violet
The National
High Violet
4AD
États-Unis
Ça faisait trois ans qu’il était attendu. Après Boxer paru en 2007. Après un triomphe auprès de la presse rock mondiale. Après quatre albums délectables. Ça faisait bien trois ans que l’on attendait High Violet. Parce que dans la vie, il y a les albums qu’on aime bien se procurer une fois qu’ils sont sortis, il y a ceux qui sortent de nulle part et il y a ceux que l’on attend… impatiemment.
The National a tout de suite interpelé la critique qui lui octroie, depuis ses débuts, un respect total, notamment depuis son deuxième LP sorti en 2003, Sad Songs For Dirty Lovers. C’est avec les parutions explosives d’Alligator en 2005 et de Boxer en 2007, que The National a su séduire toute la planète rock.
Lorsque le chanteur Matt Berninger entre sur scène vêtu d’un complet et affichant un air serein, on s’attend à ce que les chansons, majoritairement mélancoliques et planantes, finissent par rendre leur spectacle monotone. Eh bien, lorsque Berninger délaisse sa sobriété initiale pour se mettre à hurler les paroles de ses pièces avec une énergie grandiose se mêlant à un tourment palpable, tous ces préjugés s’envolent. Sur High Violet, le contraste entre les diverses émotions du chanteur est si imposant que l’on en devient ému à notre tour. Avec des textes aussi poignants que ceux de Conversation 16 et Vanderlyle Crybaby Geeks, interprétés avec une sensibilité aussi tangible, The National a offert à l’année 2010 un cadeau tout simplement inoubliable… Un album qu’on attend, qu’on conserve et dont on se souvient.
Élise Jetté
#9 : The Walkmen – Lisbon
The Walkmen
Lisbon
Fat Possum
États-Unis
Grâce à ce sixième album studio, le groupe américain The Walkmen peut être consacré comme l’un des groupes indie rock phares des dernières années. Mené par l’intensité du chanteur Hamilton Leithauser, le son du groupe s’est raffiné d’album en album pour aboutir à une texture sonore unique dans le monde du rock.
L’ouverture Juveniles progresse lentement sur un rythme de batterie sympathique qui accompagne les montées et descentes des cordes de guitare, pour aboutir sur un « you’re one of us, or one of them » scandé par un Leithauser mélancolique, mais heureux. Le simple Stranded est propulsé par un arsenal de cuivres mielleux. Il s’agit du titre le plus langoureux de l’année 2010, qui accomplit l’exploit de fusionner lenteur et intensité. Woe is Me et Angela Surf City mettent en valeur les talents de batteur de Matt Barrick grâce à des rythmes hors du commun mais suffisamment pop pour ne pas tomber dans la marginalité.
Composé en hommage à la belle capitale du Portugal, Lisbon s’écoute comme un livre dont chaque morceau serait un chapitre. Bien que le reverb, accessoire sonore favori du quintette, prenne encore beaucoup d’espace sonore, la symbiose entre tous les instruments est l’un des éléments marquants du disque. Et la voix de Leithauser, inspirée par Bob Dylan, nourrit parfaitement ce bel hommage à la Ville blanche.
Olivier Morneau
#8 : Crystal Castles – Crystal Castles II
Crystal Castles
Crystal Castles II
Fiction
Canada
Voilà un autre album dont on aura dû devancer la date de sortie de plusieurs mois en raison des pirates informatiques. Il s’agit de la surprise de 2010, rien de moins! Clairement plus sympathique sur album que sur scène, le duo électro-punk de Toronto nous offrait un deuxième effort beaucoup moins inégal que leur précédent, paru en 2008. Prenez les meilleurs moments de ce premier album (Untrust Us, Magic Spells et Crimewave) et multipliez-les par treize!
Enregistré dans des endroits (possiblement) peu fréquentables d’Islande, de Detroit, de Londres et du Nord de l’Ontario, ce deuxième album marque l’arrivée d’une nouvelle tangente rock empruntée par le duo. Une nouvelle tangente que l’on pouvait déjà entrevoir sur la pièce Tell Me What To Swallow qui clôturait leur parution de 2008. On pense aussitôt à My Bloody Valentine et à Ladytron.
Tout comme pour son album précédent, Crystal Castles II regorge de simples potentiels (Celestica, Pap Smear, Vietnam et Intimate) qui ne feront qu’accroître le culte qui tourne autour du duo depuis ses débuts. Pour son troisième simple, le duo a même eu la chance de collaborer avec Robert Smith (The Cure) sur la reprise de Not In Love du groupe new wave canadien Platinum Blonde. Une collaboration qui laisse espérer une réalisation signée par Ethan Kath pour le prochain album de The Cure!
On leur souhaitait de tomber dans l’oubli, mais pour l’instant, ils font toujours partie des artistes à surveiller!
Mathieu Saint-Jean
#7 : Flying Lotus – Cosmogramma
Flying Lotus
Cosmogramma
Warp
États-Unis
Le californien Flying Lotus (Steven Ellison) aura finalement réussi à recevoir toute la reconnaissance qu’il méritait (autant critique que commerciale) avec la parution de son troisième album complet. Annoncé plusieurs mois à l’avance comme étant un album phare de la scène électronique et ayant été victime de plusieurs fuites sur Internet (à divers stades de sa création), Cosmogramma n’aura certainement pas déçu tous ceux qui en auront pris sa défense.
Véritable fourre-tout musical, ce voyage de 17 pièces imaginé à partir du laptop d’Ellison a eu comme effet de réveiller une scène musicale qui sombrait depuis quelques années au son du mouvement dubstep. Empruntant autant au jazz (Arkestry) qu’au hip hop (Computer Face/Pure Being), en passant par la musique de jeux vidéo (… And The World Laughs With You) et la musique IDM (Do The Astral Plane), Ellison aura réussi l’impossible en dotant Cosmogramma d’une surprenante linéarité.
Quelque part entre Aphex Twin, Dj Shadow et Prefuse 73, Steven Ellison a signé l’album électronique le plus excitant depuis Untrue de Burial. Un malheureux oubli en vue de la 53e remise des Grammy Awards, mais pour le peu que ça représente aujourd’hui… Au fait, quelqu’un savait que le producteur BT avait lancé un nouvel album en 2010?
À se procurer aussi : le Pattern+Grid World EP, qu’il vaut beaucoup mieux considérer comme un complément à l’album qu’une compilation de pièces trop faibles pour s’y retrouver.
Mathieu Saint-Jean
#6 : Owen Pallett – Heartland
Owen Pallett
Heartland
For Great Justice / Domino
Canada
Owen Pallett s’est fait connaître, entre autres, grâce à ses collaborations avec Arcade Fire, pour lequel il arrangeait les compositions de cordes. Son énorme talent est en partie responsable du succès et de la puissance émotive de Funeral. Et si ses disques précédents, lancés sous le nom de Final Fantasy, n’ont pas eu la reconnaissance qu’ils méritaient, Heartland remet les pendules à l’heure. Album concept, dont la trame narrative est composée de dialogues entre un jeune fermier violent et son dieu, nommé Owen, Heartland reprend les inspirations de jeux vidéo de ses précédents albums et les amplifie avec des bases de disco et de pop des années 70.
En plus de son propre violon, Owen Pallett a fait appel à un orchestre sur Heartland. Des pièces comme Midnight Directives et Tryst With Mephistopheles, fortement dirigées par les différents niveaux de cordes, constituent des moments épiques qui représentent bien l’univers qu’a voulu créer le musicien. The Great Elsewhere et Lewis Takes Off his Shirt, montent en intensité pour aboutir à des finales chargées d’émotion.
Owen Pallett a voulu faire ressentir la colère, le désespoir et la solitude à son personnage de fermier, impuissant face à Owen. Combinant ses précédentes expériences en tant que collaborateur d’Arcade Fire à ses expérimentations classiques précédentes, le musicien a accouché d’une oeuvre démesurément puissante et unique en son genre. La pop orchestrale sera désormais un genre bien en vue.
Olivier Morneau
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